L'ami des filles... ou Chas-Laborde

Année: 1921

Auteur: Francis Carco (1886 - 1958)

Artiste: Chas-Laborde (1886 - 1941)

Éditeur: Ronald Davis et Cie

Couverture de L'ami des filles... ou Chas-Laborde

Le 26 mai 1958, aux environs de dix-neuf heures trente, la voix du célèbre acteur français André Luguet retentit à la télévision, à l'occasion d'une émission culturelle. Il récitait un poème écrit sur une vieille carte postale:

De Bayonne où je vous écris

Cher Tristan Derème

Combien je regrette Paris.

A peu près en même temps, son auteur, Francis Carco, rendait son dernier souffle au numéro 18 du Quai de Béthune, sur l'île Saint-Louis. Carco, né François Carcopino, avait la réputation d'être un poète et un romancier passionné, un observateur objectif (mais capable d'émotions) de la vie de la rue, des petits et grands criminels, des ivrognes, des prostituées et des proxénètes de Montmartre.

Francis Carco possédait de multiples talents: il était non seulement auteur de poèmes et de romans, mais également d'essais, de reportages, de livres d'art, de mémoires et de chansons, et il connaissait quiconque comptait un tant soit peu à l'époque dans le monde des arts et de la littérature: Colette, Modigliani, Katherine Mansfield, Picasso, Apollinaire et bien d'autres encore. Il mena une vie sûrement aussi passionnante et variée que ses propres romans, ce qui a certainement renforcé le caractère authentique de son travail. A partir de son roman Rien qu'une femme (1921), Carco écrivit toujours à la première personne du singulier. Il affirma un jour à ce sujet: 'L'identification entre le personnage qui parle et moi-même est absolue'.

Une famille de fous

François Carcopino naquit en 1886 à Nouméa, en Nouvelle-Calédonie, un bagne colonial français où son père travaillait comme gardien. Carco qualifiait sa famille, qui était d'origine corse, de 'famille de fous'. Il faisait sûrement référence au caractère violent de son père, qui lui administra de nombreuses corrections dans son enfance. Les biographes de Carco expliquent ainsi sa révolte et son anticonformisme, sa mélancolie et son pessimisme dans la vie.

Carco écrivit des poèmes dès son adolescence, poèmes qui furent publiés au début du vingtième siècle dans quelques journaux de province. Il devint un romancier célèbre après la parution de son best-seller Jésus la Caille (1914), un livre ayant pour personnage principal un souteneur homosexuel dans le monde de la pègre à Montmartre. En 1920 devait également paraître une édition de Jésus la Caille avec trois illustrations de Chas Laborde.

En 1921 fut publié L'ami des filles, ou Chas-Laborde, commenté par Francis Carco, un livre composé de dessins de Chas Laborde et d'un texte de Carco qui est à mi-chemin entre une évocation poétique et une critique artistique. L'exemplaire de la Collection Koopman comprend une suite supplémentaire en couleur des illustrations. C'est une édition de luxe de la maison Ronald Davis et Cie, une librairie parisienne située à l'époque rue de Courcelles, sur la rive droite. Grâce à sa clientèle fidèle, cette firme pouvait régulièrement publier ce genre d'ouvrages de luxe. Le texte, tout comme les illustrations aux lignes épaisses, évoque l'atmosphère de l'amour vénal: une jeune femme sous des draps et son client assis au bord du lit; une tenancière derrière les barreaux d'une maison close; deux filles nues dans un lit.

Filles

Lycéen, Carco écrivait déjà des poèmes dans les bordels de Nice et les lisait aux filles de joie, que cela amusait. 'J'aime les filles. Tout ce qui touche à leurs petites séductions m'émeut et je me demande souvent pourquoi nous rougissons d'avoir du goût pour elles', écrit-il dans L'ami des filles.

Mais l'amateur de filles dont il est question dans cet ouvrage n'est pas Carco, mais l'artiste Chas Laborde. Dans son introduction, Carco vante les qualités de Chas Laborde et la manière dont il réussissait à saisir le monde 'des filles'. Carco ne s'appuyait pas uniquement sur les dessins illustrant L'ami des filles, mais il avait également en tête d'autres œuvres de Laborde: des tableaux, mais surtout ses scènes de rue, croquées avec justesse, représentant des dames et des messieurs élégants, des filles de petite vertu, ainsi quedes parcs, des théâtres et des cafés pleins d'animation. C'étaient des croquis qui ressemblaient souvent à des dessins de bande dessinée, qui étaient idéals pour servir d'illustrations, et dont le style, que l'on peut qualifier de typiquement français, est largement répandu.

Description bibliographique

Description: L'ami des filles... ou Chas-Labrode / commenté par Francis Carco ; [dess. de Chas-Laborde]. - Paris : Ronald Davis et Cie, 1921. - [26] p. : ill., 19 cm

Imprimeur: Inconnu

Tirage: 175 exemplaires

Exemplaire: No. 124 des 115 (numérotés de 36 à 150) sur papier pur chiffon

Note: Avec une suite des illustrations, Avec envoi autographe de l'auteur

Bibliographie: Bénézit 3-518 ; Carteret IV-89 ; Édouard-Joseph I-280 ; Mahé I-400 ; Monod 2221

Cotation: KW Koopm A 146

Références bibliographiques

  • Jean-Jacques Bedu, Francis Carco au coeur de la bohème. Paris, Éditions du Rocher, 2001
  • Paul van Capelleveen, Sophie Ham, Jordy Joubij, Voices and visions. The Koopman Collection and the Art of the French Book. The Hague, Koninklijke Bibliotheek, National Library of the Netherlands; Zwolle, Waanders, 2009
  • Paul van Capelleveen, Sophie Ham, Jordy Joubij, Voix et visions. La Collection Koopman et l'Art du Livre français. La Haye, Koninklijke Bibliotheek, Bibliothèque nationale des Pays-Bas; Zwolle, Waanders, 2009
  • Francis Carco, Rendez-vous avec moi-meme. Paris, Albin Michel, 1957
  • Guy Laborde, Charles Laborde. Alfortville, Quatre Feuilles, 1970